Le geai fut longtemps considéré comme le porte-voix des victimes de tyrannies sanguinaires.
Grâce à sa faculté d'imiter le cri d'autres animaux, le geai a développé un chant qui s'adresse à tous les habitants de la forêt et peut ainsi les prévenir du danger humain. Cette qualité ne l'empêche cependant pas de se faire attaquer violemment par certaines espèces ingrates. Une légende veut que, au moment fatal, pour tenter de décontenancer ses assaillants, le geai imite la parole des hommes, comme s'ils étaient à proximité. Il ne prend cette voix humaine qu'en danger de mort.
Durant la Terreur, le très populaire Chant du geai à l'heure de la mort symbolisait le destin qui s'abattait sur d'authentiques révolutionnaires dont les voix d'une portée pourtant universelle furent soudainement coupées sous les pulsions mortifères de Robespierre.

Quand la forêt connaît l'effroi
Dans la tempête qui fait loi,
Quand les nids arrachés tournoient
Aux vents qui soufflent chaud et froid,

Il est l'heure de s'en aller
Oublier qui l'on a été,
Il est temps de se préparer
À chanter de l'autre côté.

Les paroles de cette chanson, prononcées par le geai pour se sauver, sous-entendent que pour mieux fuir la mort, il faut l'accepter pleinement.
Une manufacture parisienne de papier peint ayant pignon sur rue dans les années 1790 reprit courageusement pour une de ses productions la figure d'un geai chantant dans la gueule d'un loup. La répétition du motif traduit bien le sentiment éprouvé devant la multiplication des exécutions à cette époque.

Le Geai victime du Roi des hommes, dessin d'Édouard Traviès, 1789

s

Le Geai attaqué par les crabes, anonyme, 1793

Le chant du geai à l'heure de la mort, motif de papier peint,
réf. fabricant : Jacquemart et Bénard, 1794